Globicyclette au Vietnam

 

 

 

 

Xin Chao, amis voyageurs!

Prêts pour un dernier petit tour en Asie du Sud-Est? Allez, quel pays n’a-t-on pas encore découvert ensemble? Après la Thaïlande souriante, le Laos nonchalant, les temples énigmatiques du Cambodge, il nous reste… le Vietnam bien sûr! Pays de cartes postales, peut-être le premier auquel on pense quand on nous parle d’Asie. Un pays dont on nous a dit du bien… et du mal, et qu’on brûle donc d’aller découvrir par nous-mêmes. Suivez-nous, nous voici à la frontière entre Vietnam et Laos, et dans quelques coups de pédale nous allons entamer cette dernière étape asiatique du voyage: voici les aventures de Globicyclette dans le Vietnam du Nord!

Petite note: comme pour les derniers carnets, on vous fait partager nos aventures au jour le jour, ou presque, avec à chaque fois les lieux de départ et d'arrivée, le kilométrage, et le dénivelé parcourus. Bonne lecture!

 

12 mars, 618ème jour: Cyclistes dans la brume
[Laos —> Tây So’n ]

 
Ça commence bien: vous savez quoi? 4 km avant la frontière, sans même s'en apercevoir, nous avons passé nos... 20 000 km!! La moitié d'un vrai tour du monde: vive Globicyclette!

Le passage de la frontière se fait sans souci, même si à l'inverse de nos attentes, c'est côté Vietnam, et non Laos, que l'on tentera de nouveau de nous extorquer des «bakchichs» officieux: «one dollar for stamp!». Hein? Ah, non non non, le tampon, vous avez un salaire pour ça! «Nous savons que c'est gratuit». Comme la dernière fois, les douaniers nous rejettent alors nos passeports et font mine de nous ignorer. Pas de problème, on connaît la stratégie... Amanda fait alors semblant de téléphoner à l'ambassade avec son portable, et soudain, la magie opère: une main récupère nos passeports, et pam! poum! tamponnés, gratuitement bien sûr: merci bien... Nous partons sans demander notre reste, car les douaniers détestent «perdre la face», et... à nous le Vietnam!
Vietnam qui commence par une descente plutôt raide plongeant dans la brume. La brume? eh bien oui, on dirait que le soleil s'est arrêté pile à la frontière: à l'ouest du col, rayons ardents et ciel bleu, et à l'est, un fond de l'air presque frais sur fond de grisaille brumeuse. C'est parti, plongeons dans ce nuage qui n'attend que nous! ouh, que c'est humide... le thermomètre est passé en quelques minutes de 40° à 27°C, et le changement d'atmosphère est impressionnant: nous dévalons à présent une route en pleine jungle. Derrière la brume, tout est vert, presque luxuriant, et nous retrouvons les fougères arborescentes immenses que nous avions laissées en Nouvelle-Zélande. Quel dommage que nous n'ayons pas plus de visibilité, car le paysage de ces montagnes raides couvertes de jungle doit être splendide. Nous nous offrons ainsi une quinzaine de kilomètres de joyeuse descente à toute allure (presque, car ça tourne et ça vire), qui va nous ramener bien trop vite au niveau de la mer: ben zut, nous qui pensions descendre en pente douce jusqu'à Vinh, dans 90 km, c'est raté!
Puis progressivement, la route s’aplatit, la jungle disparaît, remplacée par des pâturages puis de belles rizières vertes, et nous voyons apparaître nos premiers villages: après les maisons de bambou du Laos, celles de bois du Cambodge, voici, comme pour les Trois Petits Cochons, les maisons de brique (ou plutôt, de pierre) du Vietnam! Tout est beaucoup plus riche, plus moderne. Les Vietnamiens ont des habits propres et colorés, les filles sont coiffées avec coquetterie, les enfants ont des cartables sur le dos: à part dans les capitales, on n'avait pas vu ça depuis... la Chine, peut-être, et encore, pas pour les cartables! On voit même passer un vélo à assistance électrique. Tout est plus bruyant, aussi: le moindre véhicule participe au concours du klaxon le plus tonitruant, et des «hello!» énergiques fusent de chaque habitation que nous dépassons. Le Lonely Planet disait: «le Vietnam a la pêche». En quelques minutes, l'expression se confirme parfaitement, et finalement, c'est plutôt agréable. Nous regretterons peut-être un peu les jolis villages de bambous laotiens, mais ce nouveau «retour à la civilisation» a quelque chose d'agréable: on se sent de nouveau en territoire connu! D'autant que la plupart des gens croisés sur la route nous font d'enthousiastes sourires, même chose pour les scooters innombrables qui nous doublent en ralentissant. Sans parler des myriades d'écoliers en veste d'uniforme qui nous coursent sur leurs vélos ou nous acclament au passage.
On dépasse une première petite ville qui doit avoir trois fois la taille de Savannaket, mais il va falloir nous arrêter là car le soleil se couche...

Ça tombe bien, nous arrivons justement sur les bords de la rivière que nous longeons depuis un moment: près de l'eau nous attend un bivouac de rêve, caché de la route et de ses maisons par un petit dénivelé. Du gazon ras, bordé de sable, avec la rivière comme baignoire pour le décrassage du soir. Plus une eau presque transparente, ça change du Mékong, que demander de mieux? Vive le Vietnam!

13 mars, 619ème jour: Un temps à prendre le bus
[ Tây So’n —> Ninh Binh: 70km – 95m ]

 
On dirait qu'on a définitivement laissé le soleil avec le Laos... ce matin nous sommes entourés d'un brouillard humide et épais: inutile de dire que le bivouac ne sera pas levé en cinq minutes... Mais nous finissons tout de même par nous mettre en route, et la brume se lève un peu. Même sous le ciel gris, les rizières à perte de vue que nous longeons ce matin, ont un vert brillant qui nous charme. Alors que nous nous disons que décidément, ce pays est plutôt agréable, surtout avec ses 25°C, un terrible camion vient nous rappeler un défaut cuisant des Vietnamiens: le chien! ou plutôt, le trafic alimentaire qu'ils en font. Ce camion est plein à craquer de cages étroites où sont entassés des dizaines de chiens terrorisés et jappant désespérément. Nous savons bien à quoi ils sont destinés... et nous restons stupéfaits par ce spectacle navrant... il faut dire que notre culture joue beaucoup: un camion de porcs n'aurait pas eu sur nous le même effet!
Notre mission du jour cependant, ce n'est pas de sauver les chiens vietnamiens de leur destin, mais de trouver le moyen de rejoindre rapidement la ville de Ninh Binh, plus au nord: notre court séjour au Vietnam ne nous permet pas en effet de tout parcourir à vélo, et cette région est moins intéressante que les montagnes du nord... D'après la carte, nous devrions sous peu croiser la voie ferrée qui relie Vinh, la ville côtière voisine, à Hanoï, au nord. Et qui passe par Ninh Binh. Parfait, non? ce serait trop simple... Car la gare de la ville suivante a tout d'une station fantôme. Nous finirons par comprendre qu’il n’y a pas de train aujourd’hui, et demain, qui sait? Bon, on tente le bus alors, même si la solution est moins agréable: elle nous rajoute plus de 20km pour rejoindre la gare des bus de Vinh, la grosse ville voisine que nous voulions éviter… le tout sous un crachin normand et un vicieux vent de face qui nous l’envoie en pleine figure. Seul point positif du tableau: c’est l’occasion de découvrir la gentillesse des vietnamiens. Malgré la pluie, par deux fois des scooters n’hésiteront pas à prendre le temps de nous tracter, jusqu’à ce que nos chemins se séparent, avec un «Welcome to Vietnam» en guise d’adieu: sympa!
Une pause déjeuner au milieu nous fait découvrir qu’ici aussi, le feú est de rigueur: il se prononce pareil mais s’écrit «Phó». Aaah, que c'est bon de retrouver un alphabet latin! Le bord de la route regorge de panneaux que nous déchiffrons en roulant: Phò, ça, ça va! Cóm, toujours écrit à côté de Phò: ça, c'est du riz. Thit? c'est «viande», et le plus facile? «Cá fé! mais le café glacé, au grand désespoir d’Olivier, ça n’existe plus: «c’est l’hiver ici», «que café chaud», c’est ce qu’on comprend. Café chaud… noir: heureusement qu’on a toujours notre lait concentré sucré sur nous, hé hé!
Vinh, où nous finissons par arriver malgré la coalition vent/pluie/froid, est une petite ville provinciale qui nous semble immense et ultramoderne après les villages du Cambodge et du Laos… Et voici la gare des bus. A peine y posons-nous une roue que nous sommes sollicités de toutes parts: «Where you go? you go Hanoï? where you go?». «Heu, we go Ninh Binh!». «Ninh Binh? my bus go for you now, 700 000 Dhong!». Un bus qui part tout de suite, ce serait parfait, mais 700 000 D (environ 35€), faut pas rigoler non plus: à la gare, les tarifs affichaient 150 000 D pour deux au maximum! Tant pis, nous prendrons le train. «600!». «Non, non!». «500!». «Bon, allez, on va chercher la gare, il se fait tard». Alors que nous sortons de la gare routière, l’un des négociateurs nous court après. «200!». Ah? ça devient intéressant: «Nous deux, avec les vélos?» «200!». Bon, dans ce cas… allons-y! Car depuis tout ce temps, les autres passagers du bus attendent… Nos vélos sont chargés en quelques minutes, assez brutalement il faut dire (aïe! l’appuie-tête de Philéas est tout tordu!), mais finalement, une fois assis à l’abri du crachin, on s’en sort pas si mal! Enfin… jusqu’à ce que l’assistant du chauffeur vienne collecter l’argent: Amanda tend les 200 000 dhongs… «Non non! 400!» Ah, ça va pas recommencer! «Vous avez dit 200!» «200… chacun!» Ben voyons… les gestes étaient pourtant explicites. On refuse donc de céder au chantage: «Très bien, on s’en va, descendez-nous!». Bizarrement, ils changent alors de tactique, nous rendent nos billets, et s’en retournent à l’avant. Bon, pourquoi pas? le bus, pendant ce temps, roule vers Ninh Binh, nous dedans, ça nous convient!
En fait, les assistants du chauffeur vont revenir à la charge à peu près toutes les dix minutes, en essayant de nous intimider ou de faire comme s’ils n’avaient pas compris. Toujours le même manège: donnez l’argent, on compte, oh il manque 200, comment ça non, argent rendu avec mépris, et rebelote 10mn plus tard. Nos hésitations quant à notre bon droit sont heureusement balayées quand nous observons les autres passagers payer seulement 70 000 pour un billet jusqu’à Hanoï: ça va, on se fait avoir même en donnant 100 000 chacun! Et puis après environ deux heures de trajet, notre insistance porte ses fruits: l’argent est enfin accepté, avec un commentaire en vietnamien pour ne pas perdre la face. Il semblerait d’ailleurs que tous les passagers n’aient pas apprécié cette tentative d’arnaque: à la pause, l’un d’entre eux nous offre carrément notre dîner: «Welcome to Vietnam!». Voilà qui confirme notre bonne impression des vietnamiens (sauf les chauffeurs de bus), et qui contredit les avertissements qu’on nous avait promulgués: les autres voyageurs n’auraient-ils croisé que des chauffeurs de bus?
En tout cas, il fait bon, pour une fois, voyager à l’intérieur: dehors, le crachin s’est mué en tempête, et les rafales de vent giflent d’eau les flancs du bus: un temps à ne pas mettre un vélo dehors! (en plus, c’est vent de face, gnark, gnark).
Il est plus de 22h et nous tombons de sommeil lorsque le bus nous débarque prestement à Ninh Binh. Pas le choix, ce soir, c’est guesthouse! Pour 6$ nous voilà dans une chambre rien qu’à nous, avec douche et des matelas plus confortables que tous ceux du Laos et du Cambodge. Ouh, qu’on va bien dormir…

 

14 mars, 620ème jour: Repos pour Globicyclette
[Ninh Binh —> Tam Coc: 14km – 18m ]

 

Ce matin, vu notre coucher tardif, c'est grasse-mat! Petit-déj à l’hôtel, internet, lessive… Quand on se décide enfin à quitter les lieux, l'après-midi est déjà bien avancé... mais un peu de repos nous a fait du bien. On fait un tour par le marché: Amanda est aux anges. Il y a de tout! des produits frais, fruits, légumes, viande, du tofu, des nems tout juste frites et qui ne coûtent rien, des baguettes («Banh-Mi», la version vietnamienne de... «pain-de-mie! d'où le: «Banh Mi Pâté»!), des beignets de banane... le tout pour des prix tout à fait corrects: même pas (ou si peu) d'arnaque au touriste dont on nous avait menacés au Vietnam! C'est décidé, on aime ce pays...
On se met ensuite en route vers la prochaine destination: le célèbre site de «Tam Coc», appelé aussi «baie d'Halong terrestre». En fait, c'est tout près de Ninh Binh, et nous y arrivons en fin d'après-midi.

Le ciel reste blanc-gris comme depuis notre arrivée au Vietnam, mais au moins, il ne pleut plus, et le paysage est effectivement magnifique: des pitons érigés au milieu des luxuriantes rizières, qui deviennent bleus, puis mauves dans la brume du soleil couchant. On aime!

Mais où va-t-on trouver un bivouac? C'est que tout l'espace est occupé, soit par des rizières, soit par des montagnes, soit par des maisons: même les tombes sont installées au beau milieu des rizières! L'endroit semble plutôt sûr, et nous finissons par nous poser tout au bout du petit village touristique de Tam Coc, carrément sur l'immense terrain vague réservé au parking des bus s'y arrêtent pendant la journée pour décharger les touristes. Mais ce soir, tout est désert et calme, et nous nous décidons après avoir demandé (par gestes!) à un villageois qui s'y promène avec ses enfants. Ceux-ci sont ravis de nous voir monter la tente! Et tout ce petit monde finit par nous laisser à la nuit tombée, en nous souhaitant (on suppose) bonne nuit. Ils parlent en vietnamien, on répond en français, mais on se comprend quand même! C'est l'heure des tartines de pâté (cadeau de Flo) sur nos mini baguettes achetées au marché de Ninh Binh: on les fera même griller à la poêle... et on les savourera à la lueur de la bougie...

 

15 mars, 621ème jour: Une charmante invitation
[Tam Coc —> Doi Song: 49km – 117m ]

 

Aujourd'hui, nous jouons les touristes sur la Baie d'Halong terrestre! Nous achetons nos billets qui nous permettent de visiter le site par une charmante promenade en barque de deux heures.

Nous voilà donc en amoureux au fil de l'eau, conduits par une rameuse peu bavarde mais souriante. Elle parvient même, pour reposer ses bras, à ramer... avec ses pieds! Comme les autres rameuses des barques voisines d'ailleurs, ce qui donne un spectacle plutôt intéressant: quelle habileté! serait-ce l'équivalent maritime du vélo couché?
En tout cas, la balade est magnifique, et nous fait passer sous trois grottes au plafond bas et riche en stalactites ouvragées. «Trois grottes»... ça se dit «Tam Coc» en vietnamien!

De retour sur terre, nous partons visiter les temples voisins supposés très beaux, mais qui nous déçoivent: ils sont minuscules, peu décorés, bref ne tiennent pas la comparaison face aux plus simples des temples du Cambodge ou de Thaïlande. Ah, on a été trop gâtés avant! Le dernier élément de notre visite est une jolie grotte (terrestre, celle-ci) ou d'immenses stalactites et stalagmites tout en colonnes et en drapés prennent des formes qui stimulent l'imaginaire: éléphants, arbres, nymphes, monstres... Mais alors que nous nous apprêtons à y entrer, un gardien nous barre la route: «10 000 dhongs! Comment ça? Non non, on a nos billets, et il y est spécifié que la visite de la grotte est comprise dans le prix! mais le gardien montre notre peau blanche et nos cheveux blonds: justification pour lui évidente de notre faculté à distribuer des billets! On se fâche: 10 000 dhongs, ce n'est rien, mais là, il y a délit de faciès! C'est aussi ce que semble penser un jeune couple vietnamien tout mignon qui a observé l'échange: ils finissent carrément par s'interposer... ça coupe la chique au gardien, qui nous laisser passer tous les quatre: il y a donc tant de gens adorables que ça, au Vietnam? En «échange», ils se font prendre en photo avec Amanda: avec ses cheveux blonds, ce n'est pas la première fois qu'on lui demande de poser ainsi: ça fait bizarre d'être une curiosité!
Une fois la grotte admirée, il est temps de quitter Tam Coc, car nous commençons déjà à saturer de notre jeu des touristes. Finalement, on préfère pédaler, alors... c’est reparti en direction des montagnes du nord. Nous en prenons plein les yeux sur cette petite route qui zigzague au milieu des formations rocheuses, On ne se lasse pas de toutes ces rizières en herbe dont le vert vif tapisse le moindre recoin plat...
Avec tout ça, le soleil est déjà bas: on fait une pause pour se décider sur le lieu de bivouac du soir quand une jeune et charmante Vietnamienne nous dépasse sur son vélo et s'arrête près de nous. Elle a un sourire désarmant: «venez dormir chez moi!», mime-t-elle, «pas loin, 2 km, gratuit, c'est ma famille!». Hmm... pourquoi pas! Elle semble ravie de notre accord, et nous guide vers sa maison tout en se retournant toutes les deux minutes pour nous envoyer un sourire éclatant. Elle a la pêche! Au bout d'un long chemin de terre, voici effectivement la ferme de sa famille. Maï, c'est son nom, nous présente à toute sa famille, et semble toute excitée d'avoir ramené ces deux extraterrestres à la maison. Père, mère, frère et sœurs, ils font tout pour nous mettre à l'aise, et nous testons avec eux nos premiers mots de vietnamien (comment tu t'appelles? quel âge?,...). On ne tarde pas à se mettre à «table: c'est notre premier repas traditionnel. Tout le monde s'assoit en cercle sur une nappe posée par terre et la maman dépose au milieu un grand plateau rond émaillé dans lequel se trouvent une demi-douzaine d'assiettes garnies «comme au restaurant chinois» (ha ha!). Des morceaux d'omelette, une soupe avec des morceaux de tomate, du porc frit, un bol avec du poisson, des cacahouètes grillées et confites (miam!), du chou bouilli, du tofu en tranches, et deux minuscules coupelles avec de la sauce soja et du sel arrosé de nuoc mam.

Chacun possède son petit bol et ses baguettes, et pioche à l'envi dans tous les plats. Derrière la maman, il y a le riz, qu'elle sert d'abord aux femmes. Les hommes, eux, vident d'abord plusieurs petits verres de l'eau-de-vie locale, qu'ils font passer à coups de cacahouètes. Nous y avons droit aussi, mais elle n'est pas si forte, et plutôt bonne: c'est plus une espèce de liqueur verte. Mais Olivier fera aussi les frais des «crus» de la maison, apportés pour nous: deux énormes bonbonnes d'alcool où macèrent, dans le premier, des centaines d'abeilles, et dans le second, un gros serpent! gloups... mais… hé bien, ce n'est pas mauvais du tout en fait, juste un peu fort! Bref, nous nous régalons, à la grande joie de toute la famille qui rit de nous voir manier les baguettes (pourtant on se croyait plutôt doués… pfff!) .

La suite, c'est un thé très amer servi dans de toutes petites tasses, et le tabac pour les hommes (là, Olivier y échappe, ouf), fumé dans un gros bambou de 50 cm que l'on fait passer. Thang, le père de famille, nous montre ensuite très fièrement... un DVD de karaoké! oh, oh... eh non, nous n'y échapperons pas, nous allons chanter! Nous ne ferons aucun commentaire quant à nos brillantes compositions sur «Let it be», «Knocking on heaven's door» ou «Lemon Tree»! En tout cas l'ambiance est bonne et n'a pas fait fuir Dung, la maman, qui contemple paisiblement sa petite famille, tout en berçant Tù, le dernier-né et fils du grand frère de Maï.
Il n'est que 22 h 30 lorsque tout le monde se met au lit, mais nous tombons de sommeil. Maï installe Amanda avec elle dans son lit, et Olivier avec le frère de Maï juste à côté. Il n'y a en fait qu’une grande pièce avec trois lits (le troisième pour les parents), lits qui ne sont que de grandes tables de bois sur lesquelles sont posées des nattes et des couvertures: ouille, c'est dur comme couchage! Maï se blottit contre Amanda: bonne nuit, nouvelle copine...

 

16 mars, 622ème jour: On reste un peu, alors!
[Doi Song —> Hang Tram: 42km – 100m ]

 

Tout le monde se réveille entre 6 h 30 et 7 h et Maï et sa maman n'ont qu'une requête: restez encore une nuit! C'est tentant car nous nous sentons vraiment bien chez cette famille... Mais une consultation de notre carte indique que nous sommes déjà justes pour rejoindre à temps notre destination, Lao Caï, dans les montagnes du nord où Flo doit nous rejoindre le 22.

Nous resterons donc, mais juste la matinée, et Maï nous amène faire un tour au charmant marché du village, à 5 km. Olivier et Thang, le papa, se lancent ensuite dans la réparation de la béquille d'Heïdi: une fois de plus, elle a fait les frais des rustres qui veulent monter sur nos vélos quand on ne regarde pas, grrr!

Et qui semblent malheureusement légion au Vietnam: ici, nous apprendrons à ne plus jamais laisser nos vélos en public sur leur béquille!
Le déjeuner en famille est une nouvelle version du repas de la veille, tout aussi excellente. Cette fois, l'un des plats consiste en de fines lanières de lard parsemées de petites graines qu'il faut déposer dans une feuille d'arbre assez longue, enrouler le tout et tremper dans du nuoc mâm. C'est très bon, même si le maniement du petit rouleau ainsi formé avec les baguettes reste délicat!
Mais il est hélas temps de repartir, les sacoches remplies de fruits, légumes et autres petits cadeaux qui nous touchent beaucoup. Et nous quittons cette famille dans une effusion de remerciements: notre vietnamien s'est amélioré depuis la veille!
Une fois sur la route, ça ne monte que modérément et nous progressons bien. Nous nous posons au coucher du soleil dans un champ pas trop inondé, au bord de la route, où nous serons assez tranquilles, chose rare dans ce pays densément peuplé!

 

17 mars, 623ème jour: Sacré montée!
[Hang Tram —> Tong Dau: 71km – 980m ]

 

Au début, on croirait presque que finalement, les montagnes du nord, ce sont juste des pitons de plus en plus hauts bordant une belle route presque plate entourée de rizières... C'est du moins l'impression que nous donne notre pédalage ce matin, sous un ciel toujours aussi maussade mais auquel on commence à s'habituer. Mais après le «Phò» du midi, les choses vont se gâter. Tiens, ça monte, le Vietnam? mais... ça ne s'arrête pas! et c'est vraiment raide... On carbure aux bâtons de canne à sucre que nous avons achetés en fagots sur le bord de la route: une fois épluchée, la tige se coupe en morceaux que l'on mâche pour en extraire le jus, puis on recrache la fibre sèche. C'est bon et, évidemment, sucré, mais ça n'offre aucun remède contre la fatigue des muscles. Ouille ouille ouille, promis, on ne dira plus jamais que le Vietnam, c'est plat! Entre 14 et 17h, nous abattrons près de 900 m de dénivelé...
Au bivouac du soir, que c'est humide! Voilà longtemps qu’on n’avait pas sorti le double toit, la bâche, et les sur-sacoches... et nos tee-shirts seront encore trempés quand on les renfilera demain, beuh...

 

18 mars, 624ème jour: Stop dans les brumes
[Tong Dau —> Dean ket: 47km – 240m ]

 

Nous nous réveillons en plein nuage: il fait encore plus humide qu' hier soir, et la visibilité doit être de 100 m maximum... de quoi nous donner envie de replonger dans le duvet... sauf que nous avons encore des kilomètres à gravir avant Lao Caï: allez, ouste, dehors! Mais une fois le bivouac plié, les alentours sont toujours aussi lugubres: pff, si c'est pour continuer à se faire des montées comme la veille, mais dans la brume et sans aucune vue, où est l'intérêt du pédalage? On décide sur-le-champ de tenter aujourd'hui de faire du stop, histoire au moins de sortir de ce nuage qui nous entoure et des camions nous crachant leurs gaz d’échappement pile à hauteur des poumons...
Nous dévalons donc la pente jusqu'au village du fond de la vallée, ce qui nous fait d'ailleurs redescendre tout le dénivelé grimpé la veille, et tentons d'arrêter les camions devant une station-service. Chance, le Vietnam n'est pas la Chine, et le stop fonctionne: après une vingtaine de minutes, nous voilà pris en charge par un jeune routier gentil comme tout. Le déjeuner avec lui sera d’ailleurs très sympa: notre ami chauffeur a décidé de nous faire découvrir la nourriture vietnamienne, et il nous offre carrément un repas de rois! Poulet rôti découpé en morceaux à la hache, bœuf au gingembre, porc sauté, chou bouilli, bouillon de bœuf, et riz bien sûr! Le tout précédé et suivi de leur obligatoire thé terriblement amer servi dans de minuscules tasses de porcelaine. Merci gentil chauffeur! Amanda teste avec lui son vietnamien tout neuf: bizarrement, il semble penser que nous comprendrons mieux s’il écrit ses phrases… heu…on a encore des progrès à faire!
Une fois sortis des nuages, on reprend la route pour un après-midi de pédalage musclé dans un Vietnam décidément pas plat. Le soir, nous dégottons une charmante petite cabane juste au bord de la route, mais vu l'absence de trafic sur ce chemin secondaire, ce n'est pas bien grave.

Et la cabane a... des murs, et même... une porte! ouah! On a donc une vraie petite maison pour nous, où nous dînerons à la chandelle... en compagnie de la propriétaire des lieux, une énorme araignée aussi grosse que la paume, qui a fort heureusement décidé de nous laisser partager sa maison sans trop râler… on la garde quand même à l’œil!

 

19 mars, 625ème jour: Encore des Vietnamiens sympa!
[Dean Ket —> Muong Coi: 66km – 822m ]

 

Nous nous pensions loin de tout dans notre cabane, mais ce matin nous sommes vite repérés par les habitants du village voisin, qui passent sur leur moto-scooter, ou à pied avec leurs buffles: tout le monde s'arrête en plein trajet pour venir nous observer, et nous finissons par être entourés d'une demi-douzaine de spectateurs joyeux et curieux: ils n'ont pas l'air pressés de poursuivre leurs occupations, chose rare d'ailleurs pour le Vietnam.

Bon, ben profitons-en: on leur emprunte leur coupe-coupe pour éplucher enfin correctement nos tiges de canne à sucre, et notre maladresse d'occidentaux les fait bien rire. Bon allez, fin du spectacle, on y va! et dès que nous leur tournons le dos dans un concert de «bye-bye!», la vie normale reprend son cours...
Nous on continue à grimper, dans un paysage toujours brumeux qui nous offre même ce matin un bon petit crachin... en revanche c'est plutôt joli, la route serpente à flanc de colline et nous offre des vues (brumeuses, soit) sur les rizières en étage en contrebas... et même au-dessus! En fait, nous sommes impressionnés par l'exploitation de la montagne effectuée par les Vietnamiens.

Même dans les endroits les plus raides, pas une parcelle n'est laissée à la nature. Tout est cultivé, ou en phase de l’être: brulis, arbres coupés, plantations ordonnées, flancs de colline labourés... c'est vraiment impressionnant de travail, d'organisation... et de courage. C'est qu'il faut les amener, les buffles, tout en haut de cette colline à 40°, et comment labourer dans ces pentes? sans parler des terrasses! Là aussi nous mesurons la différence d'avec le Laos où les seules altérations visibles du paysage provenaient... d'un barrage vietnamien!
Mais le crachin vient nous masquer une bonne partie du paysage et aura même une conséquence moins drôle: la route mouillée devient glissante, et Amanda qui prenait son élan dans un virage avant une grosse montée, dérape à 30 km heure et chute violemment. Aaaaïe!! Olivier, déjà dans la montée, redescend immédiatement secourir sa belle qui se relève en comptant ses os. Rien de cassé, ouf, mais un gros bleu au coccyx qui la laisse très raide et des grosses écorchures. Heidi en a pris pour son grade aussi et une séance de redressage de guidon est nécessaire: espérons qu'il ne casse pas net comme celui de Philéas au Cambodge... non, ouf: tout est remis en place correctement. Mais Amanda mettra un bon moment à aller à plus de 15 km heure dans les descentes... même sur route sèche!

Nous parvenons à un lac tout en longueur que nous traversons en ferry en 10 minutes (à l'arrivée, un homme nous offre des bananes!), puis poursuivons sur ses berges dans un très joli paysage de «fjord» qui nous rappelle un peu la Norvège. Sauf que là, le bord de l'eau est tout en rizières étagées... et qu'il est beau, ce vert lumineux de l'herbe droite! et c'est enfin un peu plus plat... Du moins jusqu'à la pause «phò», parce qu'après, la carte le dit: y' a un col! ah, et un autre! puis un autre! argh…

Mais le troisième, ça sera pour demain, là nous n'allons pas tarder à nous poser. En l'absence de boutiques sur le bord de la route, nous allons demander notre eau pour le soir dans une jolie maison de bois. Le couple entre deux âges qui s'y trouve est adorable, et ils finissent par nous inviter à passer la nuit chez eux. Chouette, une nouvelle famille pour ce soir! Nous avons de nouveau droit au thé amer et à un délicieux repas vietnamien pris à terre. Ici en fait, l'ambiance est moins «familiale: il y a surtout tous les voisins qui s'invitent pour voir les étrangers et nous ne comprendrons jamais qui fait exactement partie de notre famille hôte. Mais tout se passe dans la bonne humeur et la courtoisie qui semblent typiques du pays: on aime! Lorsque tout ce petit monde décide enfin d’aller se coucher (nous, on tombe de sommeil depuis deux heures), nous nous installons pour la nuit sur la natte et les couvertures que l'on a dépliées pour nous à même le sol, tout comme nos hôtes: en fait la jolie maison de bois dans laquelle nous sommes n'a qu'une grande pièce, sauf la cuisine à part, et aucun meuble à part l'armoire à télévision. La pièce sert de salle à manger (natte par terre au milieu, et on apporte les plats), de salon (natte poussée devant la télé) ou de chambre (couvertures et nattes sur un côté de la pièce). Là encore, autant de simplicité nous surprend surtout dans une telle maison, au balcon très ouvragé et au jardin soigné, qui nous semble assez riche. En tout cas, heureusement qu'il y a des moustiquaires à accrocher aux poutres, car ce soir c'est l'invasion des moustiques! De nuit, la vue est splendide par les fenêtres, car la lune éclaire toutes les rizières de la vallée...

 

20 mars, 626ème jour: $%!?*#de policier!
[Muong Coi —> Yen Bai: 73km – 850m]

 

Réveillés au lever du soleil, nous avons droit à un petit déjeuner de nouilles chinoises avant de repartir, tout propres d'ailleurs car nous avons pu nous laver la veille: ça faisait longtemps! Nous remercions famille et voisins et partons après quelques photos affronter le défi du jour, ce petit col bien raide que nous avions renoncé à gravir la veille. C'est d'autant plus dur que l'état de la route se détériore progressivement, ce qui nous oblige à terminer les 50 derniers mètres de montée en poussant les vélos sur un sentier défoncé de terre et de gros cailloux. Ouf, on y est! Mais en fait, ce ne sera pas la seule grosse côte de la journée... nous retrouvons un asphalte impeccable mais la route ne cesse d'escalader les montagnes pour les redescendre, toute aussi raide, juste après. Aux rizières succèdent des plantations de thé à l'ordonnance rigoureuse: les petits buissons bien taillés ressemblent presque à des buis! On déplore toujours ce temps mi-gris, mi-brumeux qui ne nous a pas quittés depuis notre entrée au Vietnam, mais malgré tout les paysages ont vraiment du charme...

Nous accusons tout de même le coup de la courte nuit: la fatigue nous rend un peu moins patients fasse à la vitalité parfois un brin encombrante des Vietnamiens: «hello! hello! hello!» infatigables des écoliers à vélo qui nous entourent par dizaines sur des kilomètres, les hommes qui tentent immanquablement de s'asseoir sur nos vélos (et de briser la béquille sous leur poids) dès qu'on les laisse deux secondes,

vieilles femmes aux dents rouges ou noires qui tripotent les bras d'Amanda (oh! des poils! des poils blonds!) en lui posant d'une voix tonitruante d'incompréhensibles questions en vietnamien, et, plus généralement, l'impossibilité continuelle d'être seuls... ne serait-ce que pour un pipi! «Aaargh, vivement la solitude des déserts australiens...», soupire Amanda, entourée d'au moins quatre villageois qui la regardent intensément manger son Phò. Et pourtant tous sont souriants, chaleureux, adorables, et finalement, quand ils parlent vietnamien, il suffit de leur répondre en français! (ce qui les fait beaucoup rire)... et d'apprendre à faire pipi très très vite...
En fin d'après-midi, nous dégottons à la sortie d'un village le coin de bivouac idéal: une bande d'herbe rase au bord d'une petite rivière, protégée des regards par un petit dénivelé de 10 m (pas évident du tout à descendre en vélo d'ailleurs, car en terre meuble...). Bon, bien sûr, nous ne restons seuls que quelques minutes avant d'être repérés par les villageois qui viennent en scooter jusqu'au rebord de la descente et s'installent carrément pour nous observer. C'est d'ailleurs la même chose de l'autre côté de la berge: Amanda ira se changer... sous la tente!
Mais nous serons enfin plus tranquilles après la tombée de la nuit. Alors que nous faisons la vaisselle, les assaillants reviennent: mais cette fois, impossible de les ignorer, ce sont les policiers du village qui nous demandent (gentiment) nos passeports pour noter nos «coordonnées» sans rien y comprendre! (ils tiennent le passeport d’Olivier à l’envers…)
Peu après, le silence se fait enfin autour de la tente. Olivier s'est endormi, Amanda termine ses carnets du jour, et elle s'apprête à refermer son stylo quand... oh non, encore du monde? Ceux-là sont carrément descendus au niveau de la tente, et lancent des «hello!» à tout-va. Amanda, peu amène, sort la tête de l'abside: «goodbye, we are sleeping now!». Mais oups... c'est un nouveau policier, probablement le grade au-dessus d'après son uniforme à galons, accompagné des deux des policiers précédents. Qu'est-ce qu'ils veulent encore? «We give passports already!» (on parle l’anglais local, ici…). Mais ça ne va pas être aussi simple... Après cinq minutes de mimes avec le «chef» (qui ne parle pas un mot d'anglais, et que l’on baptise illico Sale Flic), nous comprenons qu'il veut que nous partions d'ici: «No, no problem, we are ok here». Pas moyen, il insiste: «hôtel, hôtel!». «We have no money for hôtel!» «Hôtel!» «No!» «Hôtel!». Bon. On ne peut contredire un policier longtemps: il commence même à ramasser nos affaires qui traînent dans l'abside... halte là, très bien, on range... satané flic! (ce que nous prononçons est en fait beaucoup moins poli...), d'autant qu'il commence à pleuvoir et qu'il fait nuit noire. Mais en quoi notre bivouac embête-t-il qui que ce soit? un «voisin» mal luné nous aurait dénoncé? ou c'est juste «Sale Flic» qui cherchait comment occuper sa nuit? nous replions donc une tente trempée, et entamons l'escalade dans le noir des 10 m de terre meuble que nous avions dégringolés tout à l'heure. Quand les vélos et BOB sont enfin hissés jusqu'à la route (sans aucune aide de leur part), les policiers grimpent sur leurs scooters et nous demandent de les précéder, toujours sous la pluie et par nuit noire. Quel plan galère... D'autant que la balade nocturne va durer 5 km, jusqu'à Yen Baï, la grosse ville voisine que nous avions justement pris soin de ne pas rejoindre. Là, ils nous arrêtent devant un hôtel... mais nous refusons cette espèce de vente forcée, d'autant qu'il doit sûrement y avoir une commission dans l'air: «We told you we have no money for hotel: no money! no hotel!». Ils insistent quelques minutes mais nous gagnons le jeu du plus obstiné. Vont-ils enfin nous lâcher? Les deux partent, mais Sale Flic nous fait signe de le suivre, en insistant un peu brutalement. Il nous fait alors traverser la ville pour nous amener... à la gare! ou traîne une foule peu recommandable à cette heure de la nuit: chercherait-il à nous faire peur? «Bye-bye», nous dit-il sèchement avant de faire semblant de s'en aller. Mais quand il voit que nous repartons de là où nous sommes venus, il revient bloquer le passage: «hôtel!», répète-t-il en désignant les deux hôtels sordides qui font face à la gare. Il touche la peau d’Olivier, montre mes cheveux: ses gestes sont éloquents: «vous êtes blancs, vous avez de l'argent pour l'hôtel!». C’en est trop, nous partons sans l’écouter, Olivier bouillant de colère contre cette attitude finalement raciste (passons discrètement sur les propos tenus à ce moment là: heureusement que personne ici ne parlait français!). Mais bien évidemment Flic Collant nous suit et nous fait signe de nous arrêter devant chaque hôtel qu’il trouve, mais sans succès, et enfin devant une autre maison éclairée: le poste de police. Il y entre, s'installe comme un chef dans son fief, et redemande nos passeports. Comme Olivier menace d'exploser dans la minute, il reste dehors avec les vélos tandis qu'Amanda se prête de nouveau au recopiage des passeports sans rien comprendre, mélangeant noms et villes, numéro de passeport et date d'expiration. Le tout avec une lenteur rageante, et Amanda qui tombe de sommeil (il est minuit moins 20) a de plus en plus de mal à rester impassible... Monsieur a terminé, rend les passeports, Amanda part sans demander son reste, ce qui n'empêche pas un dernier «Hôtel! hôtel!». Soupir...
Nous voilà donc en pleine ville inconnue au milieu de la nuit. Mais où dormir? C'est Olivier qui va trouver: il y a juste à la sortie de la ville une espèce de résidence avec un parking et un grand jardin. Le portail est ouvert, et le bruit d'une télé filtre de derrière une fenêtre. Olivier part taper à la fenêtre avec notre phrase pratique écrite en vietnamien: «peut-on poser notre tente ici s'il vous plaît?». Chance, nous tombons sur un monsieur adorable qui vient examiner notre équipage: «mais bien sûr! Ici, ça ira?» (en mimes). Ouf! «Oui oui, merci merci merci!». En un rien de temps, la tente (toujours trempée) est ressortie, et nous pouvons enfin, enfin, nous glisser sous le drap. Pfffiouuu....

 

21 mars, 627ème jour: C’est le printemps! Repos!
[Yen Bai —> Mau À: 34km, 250 m]

 

Ce matin, grasse mat, nous n'émergeons que vers sept heures... guère frais! Mais il fait presque beau (= le ciel n'est plus gris mais jaune) et le crachin est oublié. On parvient même à faire sécher la tente! Nous rangeons tout sous les yeux curieux d'un tout petit garçon bavard, surveillé de sa terrasse par une gentille maman qui nous montre même où se trouve la salle de bains commune. Nous avions presque oublié que les Vietnamiens sont adorables!
Le monsieur d'hier soir a disparu, donc c'est la maman que nous remercions avant de nous remettre en route. Tiens, aujourd'hui, c'est le printemps! Et ça se sentirait presque, sur cette jolie petite route qui longe le fleuve et ses rizières d'un côté, la voie ferrée (minuscule) de l'autre. On se réveille doucement en pédalant au (presque) soleil, au rythme des «hello!» lancés par les écoliers à vélo qui nous croisent. Nous devrions longer le fleuve pendant un bon moment, et projetons donc de bien avancer aujourd'hui.

Mais nous oublions toujours que longer une rivière (ou un lac) ne signifie pas automatiquement «route plate»... Oh que non! Ici, la route se complaît à quitter les berges pour aller zigzaguer dans les abruptes collines voisines et nous ne cessons d'escalader de terribles petites côtes à 10 - 12% pour les redescendre aussitôt.

Nous arrivons un peu claqués à la petite ville de MauÀ: c'est l'heure du Phò, voire du «thit lon cho». Nous avons en effet trouvé comment commander du porc sauté avec du riz («Go com»), qu'Olivier préfère grandement à la soupe traditionnelle. Une fois les estomacs pleins, la fatigue de la nuit nous tombe dessus sans prévenir. Bah, de toutes façons on est trop en retard sur le planning pour pouvoir rejoindre Flo à temps à Sapa: nous décidons donc sur le champ de faire les derniers kilomètres… en train. Et comme ce dernier ne part d’ici que cette nuit, nous élisons nos quartiers dans le petit resto où nous sommes toujours, dont la famille est plutôt sympathique.

Olivier décide même d'aller faire un tour chez le coiffeur juste à côté, où pour 10 000 dhongs (0,50 F d'euro!) il retrouve une coupe plutôt décente. Nous finissons chacun par être invités à manger, Olivier chez son coiffeur, Amanda... au resto.


La nuit se passe dans le train pour Lao Caï, une ville tout au nord du pays, juste à côté de la frontière chinoise. Peu désireux de laisser les vélos sans surveillance, nous sommeillons devant eux à même le sol d’un wagon de marchandises, entourés de scooters, sacs de jute, cartons remplis de petits canetons, et vietnamiens endormis sur le tout au petit bonheur. Encore une nuit peu reposante, mais on se rattrapera à la guesthouse de Sapa, notre destination finale de demain, dans les montagnes!

 

22 mars, 628ème jour: Retrouvailles
[Mau À —> Sapa: 1km]

 

Arrivée en gare de Lao Caï, à sept heures du matin. On trouve sans trop de difficultés un bus où hisser nos vélos pour le dernier tronçon qui nous reste: Lao Caï – Sapa… car, pas fous, nous n'avons aucune envie de faire en pédalant les 38 km de montée et surtout 1400 m de dénivelé qui nous séparent encore de Sapa... Quand on voit la raideur des lacets que gravit le bus, on se félicite de notre choix: nous aurions trop souffert pour apprécier le paysage et c'eût été bien dommage.

Car le paysage, effectivement, est splendide: la brume qui se lève révèle une vallée abrupte aux pentes entièrement découpées en rizières en étages. Certaines sont en herbes, d'autres en eau et ce sont les plus belles, autant de petits miroirs aux formes sinueuses. D'autres enfin ne sont plus cultivées: les familles de la vallée sont peut-être parties prospérer plus bas, là où les pentes sont moins raides? car on n'ose imaginer le travail titanesque nécessaire pour transformer à ce point le paysage, surtout avec de tels dénivelés...

Quand nous arrivons enfin à Sapa, tout en haut, il y a même un peu de soleil qui pointe... et du ciel presque bleu! La petite ville, perchée sur ses montagnes, est bien plus sympathique que Lao Caï. Dès la descente de bus, nous remarquons l'abondance des habitants en tenue traditionnelle: nous reconnaissons notamment le costume noir des Hmongs Noirs, légèrement différent de ceux que nous avions pu voir au Laos. Mais d'autres ethnies aux habits différents sont aussi présentes: habit noir et coiffe rouge (Red Dao?), habit à fleurs et coiffe multicolore (Flower Hmong?), et d'autres encore. Il ne s'agit pas là d'un festival destiné aux touristes, mais bel et bien de leur tenue de tous les jours: nous en verrons par la suite bon nombre dans leurs villages, dans les rizières ou sur la route, toujours dans les mêmes tenues. Cela a alors d'autant plus de charme... car ici, tout de même, ça reste un peu trop touristique pour nous…
Mais nous admirerons les costumes plus tard: pour le moment, après cette nuit sur le sol du train, on a du sommeil à rattraper. Nous dégottons une petite guesthouse bien sympa avec vue imprenable et grande terrasse: qu’elles sont belles ces montagnes! Et... qu'ils sont moelleux, les lits... Nous n'en émergerons qu’en milieu d'après-midi, pour l’arrivée de Flo qui nous a tenus au courant de sa progression (Bangkok - Hanoï - Lao Caï - Sapa) par SMS. Amanda part à sa rencontre avec un pain au chocolat, miraculeuse douceur dégottée dans une boulangerie pour touristes... et voilà la Gueststar! inchangée, souriante, et avec plein d'aventures à nous raconter. Elle nous avait manqué, cette rebelle thaïlandaise!

 

23 mars, 629ème jour: Visites ethniques
[Sapa: 13km, environ 250 m]

 

Comment mieux commencer la journée que par un petit-déjeuner au soleil sur la terrasse? Depuis notre arrivée à Sapa, le temps brumeux de rigueur au Vietnam semble avoir fait une trêve, et nous savourons nos premiers rayons de soleil. Pas encore de grand ciel bleu, mais au moins la vue est dégagée et superbe d'ailleurs. Nous décidons d'aller passer l'après-midi à visiter les villages voisins, perdus dans les vallées qui entourent Sapa. Mais... à bicyclette, bien sûr! Sans les sacoches, heureusement, car un tour au fond des vallées nous vaut évidemment pas mal de dénivelé.

Une fois en bas, nous voilà entourées de dames et jeunes filles (voire petites-filles) Hmong, qui parlent étonnamment bien l'anglais (et même un peu français!) et vont tenter inlassablement de nous vendre bracelets, boucles d'oreilles, ceintures brochées, housses de coussins et autres produits de leur artisanat qu'elles exhibent toutes les deux minutes: «Buy me, buy me, pleaaase!». C'est un peu prenant, mais c'est aussi leur source de revenus et elles restent souriantes et gaies: on se laisse tenter par quelques babioles... et qu'elles sont jolies, avec leurs étranges coiffures à «chignon» très en avant, avec parfois un vrai peigne fiché dedans, comme s'il était resté coincé! Les plus âgées ont les lobes d'oreilles distendus par les grosses boucles d'argent qu'elles portent par dizaines, et toutes ont ce même costume noir à broderies colorées que Flo se plaira à croquer dans son carnet les jours suivants.

Mais ce ne sont pas que les habitants qui font le charme (un peu trop touristique peut-être) de cette vallée: les paysages tout en rizières sont toujours aussi magiques et nous ne nous lassons pas de nous y promener...
Nous rentrons juste à temps pour admirer le coucher du soleil de «notre» terrasse. Allez, au lit, demain un gros col nous attend...

 

24 mars, 630ème jour: Le col le plus haut!
[Sapa —> Than Uyen: 69km – 883m]

 

Pains au chocolat et café au lait sur la terrasse face à la vallée... encore une matinée qui commence bien, même si la brume est de retour: on aura au moins bien profité de notre sursis solaire de la veille! Nous voilà prêts à nous lancer dans le dernier tronçon de notre pédalage vietnamien: Sapa —> Hanoï.

Et c'est parti pour l'escalade du col de TramTon, peut-être le col le plus haut du Vietnam puisqu'il passe au pied de son point culminant, le mont Fan Si Pan à 3143m. Le col se hisse «seulement» à 1900 m et quelques, ce qui nous vaut tout de même plus de deux heures de pédalage essoufflé sur une route très raide et plutôt mauvaise et défoncée.

Oh hisse! On y parvient pile pour la pause déjeuner, et ça tombe bien, des dames y cuisent de délicieuses petites brochettes sous un abri de toile. Miam! Ça compense (ou presque? Olivier conteste) l'absence totale de vue... Sous ce ciel gris, le Fan Si Pan n'est qu'une vague forme violette qui domine dans le lointain, et la vallée en contrebas se perd dans la brume. Tant pis, profitons au moins de la descente! Nous voilà entourés de grandes montagnes brumeuses, et nous retrouvons (si vite!) en fond de vallée les rizières en étage de la veille. Nous entamons ensuite une série de montées et descentes un peu plus douces, et traversons de jolis petits villages de bois (tiens! on n'est plus chez le troisième petit cochon!) où déambulent des femmes en beaux costumes traditionnels, mais qui elles, n'essaient pas à tout prix de nous vendre leurs bracelets… Parfois, à quelques kilomètres de distance, les costumes diffèrent fortement: que d'ethnies dans ce petit coin!
Alors que le soleil baisse rapidement, nous dégottons au bout d'un petit sentier une minuscule terrasse de rizière à l’abandon, rien que pour nous, qui fait face à un superbe paysage de rizières en étage. Les occupants de la maison voisine semblent très étonnés de nous voir là, mais d'accord pour que nous nous installions sur cette mini-parcelle, et nous montrent même où se trouve la «fontaine-source» du coin pour nous débarbouiller. Notre bivouac en tout cas ravit au plus haut point tous les enfants du coin, qui se passent le mot et sont bientôt plus d'une douzaine à faire cercle autour de nous. Ils sont plus en forme que nous! Après toutes ces montées, on s’écroule vite dans nos duvets… Bonne nuit les enfants!

 

25 mars, 631ème jour: La montée interminable
[Than Uyen —> M.C. Chai: 70km – 1224m]

 

Montagne oblige, c’est un nouveau col qui nous attend ce matin, mais nos jambes sont plus fraîches et finalement nous en venons à bout plutôt facilement. Ah, qu'elles sont belles, ces montagnes couvertes de rizières!
Nous dégustons de bonne heure notre Phò du déjeuner, mais nous faisons bien: juste après, ça grimpe! La carte signale encore deux cols à passer. Pédalons! Mais... il est où, ce second col? d'ailleurs, la carte est contradictoire, car la route est censée continuer à remonter la rivière sur encore plus de 80 km: c'est incompatible avec un col, ça!? et d'ailleurs, le col ne viendra jamais. La montée, en revanche, est bien là, et nous la sentons passer: ouh, que c'est raide! d'autant qu'elle est ponctuée de petites descentes qui semblent n'avoir pour seule fonction que de retarder notre prise d'altitude. C'est qu'on a presque remonté toute la joyeuse descente de la veille!

Flo, qui aime les bivouacs seulement quand ils sont rares, consulte la carte et propose un marché: «on pédale jusqu'à M. C. Chai, qui a l'air d'une ville décente, et je vous paye l'hôtel pour ce soir!». Marché conclu, ou du moins on promet d'essayer: c'est qu'en fin de journée, notre chargement pèse de plus en plus lourd sur nos cuisses, et si Flo, légère, parvient à garder une vitesse correcte, nous peinons de plus en plus dans la côte... «, plus que 6 km... plus que cinq!», nous encourage Flo dans la montée.

Il est vrai qu'avec nos 4 km par heure, ça fait encore pas mal de coups de pédales... On résiste cependant à la tentation de se poser dans un petit recoin de la route, et nous finissons par gravir le dernier ressaut qui nous séparait encore de la ville: ouf, nous y sommes…et il ne fait même pas encore sombre! Négociation rapide d’une chambre, et hop à la douche! Nous sommes, on l'avoue, un peu claqués par cette grosse journée... et ce soir non plus, nous ne ferons pas long feu... Mais au moins, la nuit sera douillette!

 

26 mars, 632ème jour: Que c’est beau!
[M.C. Chai —> Tu Lé: 60km – 1157m]

 

La pluie ce matin nous fait apprécier d'autant plus l'abri confortable de notre hôtel. On se met tout de même en route vers 9 h 30, et poursuivons la longue montée entamée la veille.

C'est toujours aussi joli. Peu à peu la rivière que nous longeons se rétrécit, et dans l'après-midi nous parvenons enfin au col tant attendu à plus de 1500 m: nous sommes remontés plus haut que Sapa! La descente qui suit nous rappelle beaucoup notre entrée au Vietnam: alors que nous avions presque retrouvé un vrai soleil dans la montée, nous plongeons soudain dans un épais nuage. Il fait presque froid! Les virages nous offrent des fougères arborescentes et de petites cascades bien jolies. En quelques minutes, nous avons déjà dévalé 500 m.
Et soudain, le soleil réapparaît pour éclairer une vue fabuleuse de la vallée en contrebas: oooh! toujours et encore des rizières, mais le spectacle est vraiment impressionnant, en dégradé de verts lumineux soulignant des courbes de niveau sinueuses, à perte de vue... Nous voilà une fois de plus en pleine carte postale...

Ça valait le coup de tant monter, finalement! Quoique, la descente s'est achevée bien vite: voilà que ça regrimpe déjà! hmm... sommes-nous prêts à affronter un second col dans la même journée? nous hésitons, car il se fait tard... et finissons tout de même par nous lancer... et finalement le col n'est pas si terrible: c'est juste le ciel menaçant qui le rendait impressionnant! D'ailleurs, nous voilà de nouveau en plein nuage... oh là, c'est l'heure pour de bon de se poser, les opportunités de bivouacs ne sont pas nombreuses: nous nous posons dans le premier virage nous offrant un petit coin plat et à l'abri de quelques buissons, et pour une fois nous sommes... tout seuls! youpi! «Et si le vrai luxe... c'était la solitude?» (hé hé). Mmm... pour Flo, le luxe, ce serait peut-être aussi de ne pas dormir dans une flaque... car l'orage va gronder cette nuit, et la pluie va tomber... mais oui, Flo, elle est étanche ta tente!

 

27 mars, 633ème jour: L’orage passe
[Tu Lé —> Thu Cuc: 98km – 1026m]

 

Effectivement, Flo ce matin flotte sur 5 cm d'eau... mais la tente a tenu bon! On est tout de même bien humides, heureusement que le soleil pointe vite son nez pour nous sécher un minimum. Bon, on promet quand même à Flo (qui n'a pas trop aimé la sangsue découverte sur sa toile de tente!) qu'il n'y aura plus de bivouac sous tente avant Hanoi...
Et c'est reparti! Pour la première fois, on a un vrai, grand, beau ciel bleu: quel plaisir! On n'y avait pas eu droit depuis le Laos. On dévale avec entrain les descentes abruptes qui alternent avec d'affreuses petites montées, lesquelles, sous ce grand soleil, ne nous font finalement pas si peur que ça. Zou! et une de plus! D'après la carte, deux cols nous attendent encore cet après-midi, mais, effet ou non du temps radieux, nous les avalons sans presque nous en rendre compte... Bon, ok, les genoux fatiguent quand même en fin de journée, surtout quand un troisième et dernier col «surprise», achève de nous éreinter… mais ça, c’est la dure loi du vélo, alors bon, ok, on assume!

 

28 mars, 634ème jour: Fini, les montagnes!
[Thu Cuc —> Son Té: 86km – 557m]

 

Le col de la veille est en fait le dernier que nous opposeront les montagnes et peu à peu celles-ci s'amenuisent, si bien que la fin de l'après-midi nous amène sur une grande route plate que nous trouvons, finalement, bien monotone... Jamais contents, ces pédaleurs!
Ce soir, nous poussons jusqu'à la ville de Son Té: aujourd’hui, c’est «guesthouse»! Ce qui ne tombe pas si mal car avec l'approche de la capitale les rizières se font rares, et les villes se collent progressivement les unes aux autres... Dans Son Té, une jeune fille nous guide jusqu'à un hôtel: ouh la la, mais ça va être beaucoup trop luxueux pour nous, ça... et étrangement, nous parvenons à négocier une chambre pour trois à un prix plutôt correct: il est vrai qu'ils n'ont rien à y perdre... et ils vont sûrement nous refiler la chambre maudite: Olivier découvrira que pour avoir assez de pression d'eau pour prendre une douche, il doit s'allonger sur le carrelage de la salle de bains! (à plus de 50 cm du sol, l'eau ne coule plus...). De manière très asiatique, la réceptionniste que nous allons chercher fera venir deux autres employés, les trois passeront 20 minutes dans la salle de bains à «réparer», et partiront en nous affirmant que le problème est réglé... sans y avoir changé quoi que ce soit! Toujours ce refus de reconnaître les problèmes… mais on finit par s’y habituer! On part se consoler par un délicieux feù pris sur le trottoir et une orgie de fabuleux yaourts-maison dégotés dans la boutique voisine... miam! dommage qu'on en ait pas trouvé plus sur notre route, des «sua chua»!

 

29 mars, 635ème jour: Hanoï, nous voilà
[Son Té —> Hanoï: 44km – 47m]

 

Un méchant vent de face sur fond de ciel gris tente ce matin de nous empêcher de rejoindre la capitale... c'est sans compter sur notre hâte d'y arriver, guidés par une Flo citadine qui rêve de retour à la civilisation!...

Et nous y voilà déjà, dans un flux incessant de scooters klaxonnants qui nous donnent le sentiment un brin stressant de pédaler sur une piste de ski: tout le monde fonce, personne, surtout, ne s'arrête, et il suffit juste de slalomer entre ceux qui sont devant... en espérant que ceux de derrière fassent pareil! Heureusement, le périlleux exercice se passe toujours à vitesse réduite: le vietnamien klaxonne comme un furieux, mais ne dépasse pas les 30 km/h!

Flo, qui est passée par là à l’aller, nous guide comme une pro dans les petites rues encombrées du vieux quartier («Old Quarter»), jusqu'à l'hôtel que nous avions réservé et qui s'avère étroit, mais très accueillant et tout aussi luxueux que le palace de la veille, à un prix bien raisonnable. En raison de l'étroitesse des lieux (comme toute maison à Hanoi, le bâtiment a quatre étages, mais seulement 5 m de large: conséquence des anciennes taxes imposées sur la surface du sol!), nos vélos devront stationner devant en journée, mais le gentil patron promet d'y veiller comme sur ses propres enfants (qu'il n'a pas!), alors ça nous va! Nous passons l'après-midi à déambuler (à pied!) dans les rues labyrinthiques du vieux quartier, découvrant que celles-ci sont souvent «à thème» comme le Quai des Orfèvres à Paris: rue des ferronniers, rue des biscuits, rue des produits pour bébé, rue des miroirs, rue des clés et cadenas, rue des herboristes,... et bien sûr les rues «des touristes», remplies de petits magasins d'artisanat proposant notamment moults articles de soie: Flo s'est même fait faire une robe de soirée sur mesure!
Pour ce soir, nous fêtons notre arrivée à Hanoï par un petit resto chic mais raisonnable quand même, nous dégustons des nems de poisson-chat et du porc au caramel à se damner... Après tout ça, plus quelques verres d'une liqueur locale pas mauvaise, nous voilà cuits à point: au lit!

 

30 mars, 636ème jour: L’immanquable Baie d’Halong
[Hanoï —> Baie d’Halonh: 0km]

 

Nous ne pouvions nous soustraire à l'attraction symbole du Vietnam, voire de l'Asie du Sud-Est: la Baie d'Halong nous attend ce matin! Nous avons la veille acheté trois billets pour une excursion de deux jours en jonque qui semblait être le seul moyen existant pour aller visiter la baie merveilleuse: une boutique sur deux dans le vieux quartier vend des excursions, toutes absolument identiques si ce n'est la qualité de la jonque ou de la nourriture proposée. C'est confirmé, l'asiatique n'est pas innovateur!

Toujours est-il que nous voilà ce matin redevenus de véritables touristes en voyage organisé, que l'on vient même chercher à l'hôtel pour nous convoyer en bus jusqu'à la Baie. Trois longues heures plus tard, nous embarquons dans le petit port de Haïphong sur l'une des centaines de jonques en bois prévues pour les touristes, et mettons le cap vers les célèbres pitons. Malgré le nombre, les jonques sont plutôt chouettes, toutes en bois vernis, et dans la brume elles prennent presque l'allure de bateaux pirates...

Parce qu’on est, on le rappelle, au Vietnam, pays du ciel gris! Nous avons donc droit à un temps très nuageux, mais notre guide (car on a même un guide!) nous jure que nous avons beaucoup de chance: il ne pleut pas! Mais, soleil ou pas, la baie est tout de même impressionnante... je ne décrirai pas ces majestueux paysages que chacun a vu sur des cartes postales... ici, pas d'eau turquoise ni de ciel bleu, mais c'est tout de même magique. Et que c'est grand! La baie est immense et nous naviguons des heures durant entre les pitons gigantesques. Nous avons droit à deux repas à bord, un peu frugaux tout de même pour nos estomacs de pédaleurs, et surtout à une visite d'une grotte impressionnante avec d’immenses tours et drapés de pierre. Tout est éclairé par des spots bleus, verts ou roses: effet psychédélique assuré! Mais c'est tout de même très beau, avec d'immenses salles aux parois sculptées par l'érosion en autant de monstres imaginaires... Ici, un «co-co-hil», annonce le guide. «Un quoi? où ça??» ; ici, un «hagor»... un dragon? c'est que «Halong» signifie à peu près «dragon venu du ciel»... ils ont tout de même beaucoup d'imagination! Là où, en France, on nous parlerait d 'érosion et de dissolution chimique, ici les guides éclairent des monstres de légende...
Et lorsque la nuit tombe, les jonques se regroupent par deux ou trois dans une grande baie, et tous ces bateaux éclairés donnent à l'endroit comme un air de fête...

 

31 mars, 637ème jour: Kayaking entre les crêtes du dragon
[Baie d’Halong > Hanoï: 0km]

 

C'est la pluie qui nous attend ce matin... effectivement, il faisait plus beau hier! Mais nous avons tout de même droit à une éclaircie qui tombe à point pour notre excursion programmée en kayak: il fait gris mais pas si froid... enfin, on n’ira tout de même pas jusqu'à se jeter à l'eau hein, rappelons que ces jours-ci, nous ne sommes plus des aventuriers, mais de frileux touristes!

Touristes qui s'offrent donc un petit tour à la pagaie entre les crêtes du dragon légendaire: c'est encore plus joli au niveau de l'eau! De nombreux petits villages flottants de pêcheurs, dont certains se convertissent peu à peu au tourisme, plus rentable... Tours en kayak, vente de fruits et biscuits sur des petites barques, tout est fait pour accommoder les nombreuses jonques. Mais la pêche ne s'est pas interrompue pour autant et notre kayak croise de nombreuses petites barques qui posent leurs filets.

Les grands pitons que nous longeons offrent d'innombrables recoins qui font de la baie un véritable labyrinthe: nous sommes en plein repaire de pirates, sacrebleu! D'ailleurs, il paraît qu’un James Bond a été filmé par ici...
Puis c'est déjà l'heure du retour au port et nous jetons un dernier regard sur ces pierres dragonnesques qui s'éloignent à l'horizon... Débarquons, moussaillons et reprenons le bus pour Hanoï... sous une pluie battante. Ce soir, nous décidons d'aller voir un spectacle célèbre dans tout le Vietnam: les «Waterpuppets», ou marionnettes sur l'eau. Pour moins de cinq euros, nous voici dans une petite salle de spectacle où un orchestre traditionnel aux étranges instruments et voix nasillardes vient accompagner une quinzaine de petites scènes jouées par de grandes marionnettes de bois. Celles-ci sont manœuvrées par de simples bâtons de deux ou 3 m qui sont cachés... sous l'eau! car les marionnettes évoluent dans un bassin profond d'une cinquantaine de centimètres, héritier des rizières en eau où se tenaient autrefois les spectacles. Les marionnettistes sont cachés, eux, derrière un écran de bambou qui fait face à la foule. Et les bâtons qu'ils actionnent passent sous l'écran. Le stratagème est tout simple, mais les marionnettistes sont très habiles et parviennent à donner vie à leurs statues de bois qui peuvent être des personnages mais aussi des poissons, des buffles, des oiseaux (des phœnix!) ou même des dragons! Le tout accompagné de son aigu de l'orchestre qui joue juste à côté et dont nous ne cessons d'admirer les étranges instruments... Un joli spectacle!

 

1er avril, 638ème jour: Pluie sur Hanoï et Joyeux anniversaire Céline!!
[Hanoï]

 
La pluie ce matin annonce une grasse matinée: ça tombe bien, on s'était couchés tard! La journée en elle-même n'aura rien d'exceptionnel: tri des photos, Internet, une petite balade tout de même dans l'après-midi, car ça se lève. Nous visitons le «Temple de la Littérature», ancienne université illustre du pays où les érudits venaient étudier le confucianisme: c'est qu'à l'époque, l'influence chinoise était notoire et l'alphabet se faisait en idéogrammes. Puis un petit tour jusqu'au Mausolée de Ho Chi Minh, où repose son corps embaumé que nous n'aurons pas le loisir (la morbide envie d'ailleurs!) d'aller saluer: les heures de visite rappellent celles des bureaux de la fonction publique: 9h-11h, 14h-15h 30!
Ce soir, nous nous offrons une fondue «chinoise» dans un «resto» de rue: une table de pique-nique et des chaises en plastique sur le trottoir et on nous amène un réchaud à gaz sur lequel bouillonne une grosse marmite de soupe parfumée. Le serveur arrive ensuite avec des assiettes de viande et de fruits de mer crus, à verser dans la marmite et a repêcher à cuisson désirée. Le tout accompagné de patates, taro (un tubercule violet) et champignons parfumés qui viennent flotter eux aussi dans la marmite. Et ma foi, c'est copieux et délicieux! (et ça faisait longtemps qu'on n'avait pas mangé d'écrevisses...).
En dessert, on s'offre de gluantes pâtisseries au soja, achetées dans des boutiques de la rue (qui proposent des tonnes de fruits secs étranges), et là, on est mûrs pour le lit! Comme quoi, même sous la pluie, on se régale quand même...

 

2 avril, 639ème jour: Pluie sur Hanoï, deuxième
[Hanoï]

 
Journée aussi pluvieuse que la précédente, ce qui nous empêche finalement de vraiment profiter de la capitale: sous les averses, on a beaucoup moins envie d'aller se balader... Nous pousserons tout de même à midi jusqu'à un minuscule restaurant de rue et dégusterons l'unique, mais délicieux plat de la boutique, le Bun Cha, de la viande de porc marinée dans une soupe claire et épicée, à servir sur des nouilles chinoises blanches et gluantes. Un délice! C'est nous qui invitons Flo, car ce soir, elle nous emmène dans un endroit particulier pour fêter notre voyage («et le fait que vous m'ayez supportée aussi longtemps», précise-t-elle!): une école de restauration qui enseigne le métier à des gamins des rues qui veulent «s'en sortir», et les place ensuite dans des restaurants de bon niveau. Une démarche humanitaire intelligente qui nous plaît bien, et fournit en plus un resto de «luxe» à des prix tout de même abordables. Nous avions déjà testé leur filiale «Baguette et Chocolat» à Sapa (des pains au chocolat délicieux), et le repas de ce soir sera à la hauteur de nos attentes... un délice de parfums et saveurs délicates, le tout servi par au moins trois serveurs en tenue, un peu maladroits et très stressés, mais pas si mauvais que ça. Amanda est tout de même heureuse de pouvoir enfin s'écrouler sur le lit, car un gros rhume lui est tombé dessus dans la journée et elle ne tient pas la grande forme...
En tout cas, nous avons trinqué au kir à notre épopée à trois, et celle-ci se termine par une soirée vraiment excellente, pour les papilles et pour le reste: merci Flo!

 

3 avril, 640ème jour: Foutue poste et Joyeux anniversaire Mumy!
[Hanoï > aéroport: 45km – 160m]

 
Aujourd'hui, Flo nous quitte... nous voilà tout tristes de la laisser repartir pour la France. Nous profitons de notre dernier petit déjeuner à l'hôtel pour lui offrir quelques petits cadeaux, plus un diplôme de «Globicyclette Guest Star, Advanced Level» préparé les jours précédents. Mais nous avons à peine le temps de lui dire qu'elle va nous manquer que son taxi est déjà là, en avance sur l'horaire. Au revoir la Flèche d'Argent, au revoir la Guest Star... et merci pour tout!...
Nous, c'est ce soir que nous avons rendez-vous avec l'aéroport: nous voulons attendre le dernier moment avant de quitter Hanoi, car un colis envoyé en poste restante par les parents d'Olivier n'est toujours pas arrivé, malgré les promesses mensongères de La Poste en France. Un colis sur lequel nous comptions énormément, notamment pour des lunettes de soleil et des pneus de rechange Schwalbe, introuvables ici et dont nous avons un besoin urgent... Mais à 15 heures, toujours rien à la poste. La guichetière, que nous sollicitons avec acharnement depuis notre arrivée à Hanoï, finit par s'impatienter quand elle nous voit revenir à la charge toutes les heures: «puisque je vous dis qu'il faut un mois, un mois, minimum, pour les colis venant d'Europe!» (en vietnamien traduit par un client conciliant). Zut! Re Zut! Damned! Nous sommes vraiment, vraiment déçus et encore plus ennuyés par ce raté. Nous comptions tellement dessus! Le moral est donc bas tandis que nous pédalons enfin vers l'aéroport. Amanda, terrassée par son rhume, avance en comptant les kilomètres restants: heureusement que c'est plat, par ici! Nous y arrivons seulement à la tombée de la nuit, Amanda en piteux état s'écroule sur un siège tandis qu'Olivier entreprend seul de trier les sacoches et emballer les vélos, repoussant sa belle qui tente de l'aider. Nous pesons tout notre barda sur la balance de l'enregistrement des «objets surdimensionnés» (oversize). Verdict: 120,3 kilos, vélos compris: voici donc notre poids minimal, sans compter tous les habits que nous avons superposés sur nous pour économiser quelques grammes. Alors en théorie, nous avons droit chacun à presque 100 kilos au total, soute plus vélos bagages cabine. Hum... nous avons tout de même près de 20 kilos en trop! Inutile de dire que malgré le coin tranquille que nous dégottons, cette nuit dans l’aéroport ne sera pas très bonne: avec ce foutu colis, la pédaleuse en agonie, et les soucis d'avion, le stress est là... vivement les Philippines, tiens!

 

4 avril, 641ème jour: Ca passe comme une lettre à la p….. oups!
[Aéroport d’Hanoï > Kuala Lumpur]

 
Réveil à cinq heures... dur! On essaie tout de même d'avoir l'air tout à fait frais et dispos au moment de l'embarquement, en croisant les doigts... Ouf, les bagages, chacun un ou deux kilos plus lourds que la limite, passent sans souci. Les vélos à présent: «How much do they weigh?»... «Heu, 15 kilos approximately?». «Let me check at the counter». Oh oh... mais sur la balance du comptoir, le vélo est trop gros, et Olivier «doit» le maintenir droit d'une main... allégeant ainsi le vélo d'une dizaine de kilos!... «OK, 15 kilos, it's good!». Ooouf bis! et pour leur emballage? l'employé de la veille arrive juste à temps: «it's OK, no problem, just pay 13$ per bicycle!» (et c'est bien le tarif indiqué sur le site Web). Fabuleux! On s'en sort pour 26 $, c'est inespéré! (il faut dire qu'on a trois tonnes de bagage cabine mais ça, tout le monde s'en fiche). Olivier reprend des couleurs, Amanda elle garde sa pâleur d'agonisante mais retrouve quand même un faible sourire. Y'a plus qu'à embarquer! Et nous voilà dans l'avion, qui va bientôt quitter le sol vietnamien... Nous allons, comme toujours, être bien nostalgiques de cette longue partie du voyage en Asie du sud-est, mais nous avouons que nous sommes aussi ravis de changer d'horizon pour des pays un brin plus... occidentalisés? Bye-bye, Vietnam, nous avons adoré ta vitalité, tes sourires et… tes si belles montagnes!

 


Le
s petits détails du quotidien... 

 

Mangeons gaiement...

Pas mauvaise du tout, la nourriture vietnamienne! On a tout d’abord eu la joie de trouver sur les marchés une plus grande diversité de produits qu’au Laos ou au Cambodge: on sent que le pays est plus riche… Produits frais, produits importés «occidentaux», on trouve de tout par ici, et à des prix toujours réduits.

Comme dans les autres pays d’Asie du Sud-Est, nous cuisinons très peu, préférant nous ravitailler aux échoppes et petits cafés qui pullulent au bord des routes: n’oublions pas qu’ici, et même dans les montagnes, il y a du monde partout! Ce qu’on a adoré en revanche, c’est de pouvoir déchiffrer les panneaux de ces échoppes, justement. Histoire, par exemple, d’être sûr qu’on ne va pas finir avec du chien dans notre assiette! Mais ça, en général, c’est plutôt facile à voir: les boutiques qui proposent du «Thi Cho» ont en général un mignon toutou dessiné sur leur devanture (nous ça ne nous donne pas du tout envie d’essayer!). Ou pire, d’ailleurs: des têtes de chien bien réelles, en général dépecées, exposées bien en vue pour la plus grande joie (beuhhh) du passant… Ca, on en a surtout vu dans la région de Hanoï, car dans les montagnes la viande se fait plus rare.

Ce qu’on a trouvé partout, ce sont les éternels «feu», ou «Pho» comme on l’écrit ici: le bol de soupe aux nouilles (ou au riz) et aux herbes. Assez semblable à ceux du Cambodge ou du Laos, toujours avec un peu de viande en boulette au fond du bol, et ici très peu, ou pas, épicés.
Mais nous avons trouvé quantité d’autres plats sur la route, le problème étant juste de connaître leur nom pour pouvoir les commander: viande sautée, de porc en général, poulet rôti, nems (mais pas tant que ça! peut-être que dans d’autres régions…?), bœuf au gingembre, chou bouilli, bouillon de bœuf, et tant d’autres plats dont nous n’avons pas toujours eu la composition…(mais pas du chien, c’est assez facile à repérer en fait, la viande de chien ayant une forte odeur de… chien mouillé!). Le tout toujours accompagné de riz en quantité, bien sûr.

Notons les plats à la prononciation «occidentale: le «Banh-Mi», comme au Laos, mais aussi le «oplat: œuf au plat! et, facile celui-ci: le Gato!

Invités chez l’habitant, nous avons eu l’occasion de partager des repas traditionnels: je copie-colle les descriptions faites dans le récit ci-dessus, pour ceux qui ne l’ont pas lu: «tout le monde s'assoit en cercle sur une nappe posée par terre et la maman dépose au milieu un grand plateau rond émaillé dans lequel se trouvent une demi-douzaine d'assiettes garnies «comme au restaurant chinois» (ha ha!). Des morceaux d'omelette, une soupe avec des morceaux de tomate, du porc frit, un bol avec du poisson, des cacahouètes grillées et confites (miam!), du chou bouilli, du tofu en tranches, et deux minuscules coupelles avec de la sauce soja et du sel arrosé de nuoc mam. L'un des plats consiste en de fines lanières de lard parsemées de petites graines qu'il faut déposer dans une feuille d'arbre assez longue, enrouler le tout et tremper dans du nuoc mâm. C'est très bon, même si le maniement du petit rouleau ainsi formé avec les baguettes reste délicat! Chacun possède son petit bol et ses baguettes, et pioche à l'envi dans tous les plats. Derrière la maman, il y a le riz, qu'elle sert d'abord aux femmes. Les hommes, eux, vident d'abord plusieurs petits verres de l'eau-de-vie locale, qu'ils font passer à coups de cacahouètes».
Ainsi donc, la diversité des plats et leur délicatesse n’est pas réservée qu’aux restaurants! En parlant de délicatesse, nous avons aussi pu tester des plats plus raffinés dans les restaurants de Hanoï, comme des nems de poisson-chat dont on se souvient encore avec nostalgie…

A Hanoï, nous avons aussi découvert deux autres spécialités: le Bun Cha, de la viande de porc marinée dans une soupe claire et épicée, à servir sur des nouilles chinoises blanches et gluantes. Simple et très bon! La seconde, paradoxalement, c’est une spécialité… chinoise! La fondue «chinoise» se présente sous la forme d’une grosse marmite de soupe parfumée maintenue au chaud sur un réchaud à gaz. On y plonge à volonté des petits morceaux de viande ou de fruits de mer crus, à repêcher à cuisson désirée. Le tout accompagné de patates, taro (un tubercule violet) et champignons parfumés qui viennent flotter eux aussi dans la marmite. C’est copieux et délicieux!

Niveau boisson, quelques eaux-de-vie locales (où flottent des reptiles ou insectes morts, hmmm), mais surtout du thé, toujours très amer et servi sans sucre dans de minuscules tasses de porcelaine, avant et après le repas.

Pour les en-cas, on aime les bâtons de canne à sucre que nous achetons en fagots sur le bord de la route: une fois épluchée, la tige se coupe en morceaux que l'on mâche pour en extraire le jus, puis on recrache la fibre sèche. On s’est aussi gavés de gluantes pâtisseries au soja, et de fruits de toutes sortes qui abondent dans chaque marché (aahhh, les bananes asiatiques!). Et plus on pédale, plus on a faim: profitons-en, ici, presque tout est bon!


Les moments galère

  • L’expulsion de bivouac nocturne par «Sale Flic Raciste»
  • Le camion rempli de chiens hurlant à la mort…
  • Le crachin et vent de face avant Vinh
  • Les tentatives «d’arnaque» dans le bus pour Ninh Bin ou pour le tampon de la frontière
  • Sortir du duvet à 7h du matin, par 10 degrés et en pleine brume…
  • La nuit inconfortable sur le sol du train pour Lao Caï
  • Les innombrables tentatives des vietnamiens pour monter sur nos vélos (et casser la béquille) dès qu’on tourne le dos: record de tous les pays traversés!
  • Un début de lassitude face à la densité de population et à la curiosité infatigable des habitants
  • Les adieux à Flo

Les meilleurs moments

  • La toute première descente, «Gorilles dans la Brume» version viet. Et toutes les descentes «à fond la caisse» fournies par les dénivelés des montagnes du nord!
  • Le sourire et la «pêche» des Vietnamiens, un vrai bonheur!
  • L’invitation chez Maï et sa famille
  • Les retrouvailles avec Flo
  • Les costumes traditionnels des ethnies montagnardes, et leur gentillesse
  • Les incroyables rizières des montagnes, un spectacle époustouflant
  • Les pains au chocolat de Sapa et les petits déjeuners en terrasse avec vue sur toute la vallée
  • La Baie d’Halong, quand même, mais aussi la Baie d’Halong terrestre
  • Les promenades dans les rues «à thème» d’Hanoï et les bons restaus
  • La joie tranquille du pédalage dans l’air frais des montagnes, au milieu de ce vert unique des rizières…

 

Que du bonheur, ou presque, pour ce dernier pays du continent asiatique, à la fois pour ses paysages et ses habitants. On regrette presque de ne pas avoir pu y pédaler un peu plus… mais les Philippines nous attendent! Rendez-vous dans les prochains carnets…